indemnite de fin du contrat

1. INDEMNITÉ EN CAS DE CESSATION DE LA RELATION D’AGENCE

L’article 1751, alinéa 1, du Code civil prévoit qu’en cas de cessation de la relation, le mandant n’est tenu de verser une indemnité à l’agent que si (« et dans la mesure où ») les conditions suivantes sont réunies :

  • L’agent a procuré de nouveaux clients au commettant ou a développé de manière significative les affaires avec les clients existants et le commettant reçoit toujours des avantages substantiels en faisant des affaires avec ces clients ;
  • Le paiement de cette indemnité est équitable compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, notamment des commissions que l’agent perd et qui résultent de l’activité avec ces clients.

Pour que la première condition soit remplie, il convient, d’une part, de vérifier si l’agent a ou non procuré de nouveaux clients ou si les clients déjà acquis par le mandant ont été, grâce au travail de l’agent, développés « de manière significative », c’est-à-dire au-delà d’une croissance physiologique résultant d’une augmentation normale des conditions du marché ou du secteur dans lequel l’agent opère. En d’autres termes, le développement des relations commerciales avec un client préexistant doit être si important que cette expansion peut être considérée comme économiquement équivalente à l’acquisition d’un nouveau client.

D’autre part, il est nécessaire que ces clients (nouveaux ou développés), et seulement eux, continuent à faire des affaires avec le mandant après la fin de la relation avec l’agent.

Il faut donc que la valeur produite par l’agent reste chez le commettant après la fin de la relation, peu important que pendant la relation l’agent ait augmenté son chiffre d’affaires en développant, même considérablement, l’activité du commettant : l’avantage reçu par le commettant pendant la relation a, en effet, déjà été compensé par les commissions versées.

La règle n’est applicable qu’aux clients fixes, étant déterminante la circonstance que la valeur produite par l’agent est stable, devant demeurer même après la fin de la relation.

L’indemnité est donc destinée, d’une part, à dédommager l’agent des bénéfices futurs que le mandant continuera à tirer de son travail même après la fin du contrat et, d’autre part, à dédommager l’agent de la perte des résultats acquis contre une activité encore, en bonne partie, à reconstruire entièrement.

En cas de cession d’activité par le mandant, aucune indemnité ne peut être versée à l’agent, car la condition de la permanence d’avantages substantiels pour le mandant fait défaut (Trib. Turin 23/11/2009 ; Trib. Ferrara 02/05/2005).

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2. LES EXIGENCES DE L’INDEMNITÉ ET SA DÉTERMINATION

L’article 1751 du Code civil fixe une limite maximale à l’indemnité, qui ne peut être d’un montant supérieur à une indemnité annuelle, calculée sur la base de la rémunération annuelle moyenne de l’agent au cours des 5 dernières années de la durée du contrat ou de l’ensemble de la relation, si elle est inférieure à 5 ans.

Il est ensuite précisé que l’octroi de l’indemnité n’exclut pas le droit de l’agent à d’éventuels dommages et intérêts et l’agent doit notifier au commettant son intention de faire valoir ses droits dans un délai d’un an à compter de la cessation de la relation. Enfin, il est prévu que les dispositions pertinentes au détriment de l’agent ne sont pas contraignantes et que l’agent a droit à une indemnité, même si la relation prend fin en raison du décès de l’agent.

A la lecture de la disposition, il est clair qu’il y a un manque de critères pour la quantification de l’indemnité, identifiée seulement dans sa limite maximale. En fait, l’article 1751 du code civil représente la mise en œuvre (partielle) de la solution dite « indemnitaire » contenue dans l’article 17 de la Directive 86/653 (« Directive »), qui contient toutefois des critères de quantification, puisqu’il précise que l’indemnité est due à l’agent « si et dans la mesure où » les trois conditions correctement reprises à l’article 1751 du code civil subsistent.

Dans le texte du code n’était pas rapportée la phrase « si et dans la mesure où » mais, selon une opinion partagée, le sens doit être le même.

L’observation n’est pas anodine puisque les paramètres mêmes utilisés pour déterminer le montant de l’indemnité représentent un nœud encore complexe à démêler.

Conformément à l’article 1751, alinéa 3, du Code civil – qui, dans ce cas également, reprend mot pour mot l’article 17(2)(b) de la Directive -, le montant de l’indemnité ne peut dépasser un chiffre équivalent à une indemnité annuelle calculée sur la base de la moyenne annuelle des rémunérations perçues par l’agent au cours des 5 dernières années et, si le contrat remonte à moins de 5 ans, sur la moyenne de la période en question.

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3. INDEMNITÉS PRÉVUES PAR LES ACCORD COLLECTIFS (AEC)

Le nouveau texte de l’article 1751 du Code civil est intervenu dans un scénario dans lequel la négociation collective avait déjà identifié les paramètres et les méthodes de détermination des indemnités suite à la résiliation du contrat.

Même après l’entrée en vigueur des nouvelles règles, qui ont mis en œuvre la Directive, les CEA ont évolué avec une certaine autonomie, en poursuivant et en développant leurs propres critères, dont la cohérence et la compatibilité avec le système européen et national posent des problèmes importants.

L’indemnité, telle qu’elle est décrite dans les « accords ponts » (AEC Industrie du 30/10/1992, AEC Commerce du 27/11/1992, AEC Artisanat du 19/11/1992, puis reprise par l’AEC de 2002), comporte deux volets :

a) Indemnité de résiliation du contrat (FIRR).

Il est communément appelé FIRR du nom du fonds où il est mis en réserve.

L’indemnité est inspirée par un principe d’équité et est versée indépendamment d’un apport de clients ou d’un développement des affaires avec les clients existants.

Elle n’est pas reconnue dans deux hypothèses :

  • En cas de rétention indue des sommes dues au mandant ;
  • En cas de concurrence déloyale ou, dans le cas des agents mono-mandataires, en cas de violation de l’obligation d’exclusivité pour une seule entreprise

b) L’indemnité complémentaire de clientèle, qui est également divisée,

  • Dans l’indemnité complémentaire elle-même, qui est calculée en pourcentage des sommes perçues par l’agent pendant la durée de la relation. Elle est versée directement par le mandant en fin de contrat et est due à l’agent, comme l’indemnité de fin de relation, même en cas d’absence d’apport de clientèle ou de développement du volume d’affaires avec les clients existants.Elle n’est pas due uniquement si le contrat est dissous par un acte imputable à l’agent.
  • Dans l’indemnité méritocratique qui est étroitement liée à l’augmentation de la clientèle et dont le montant varie en fonction de deux facteurs :
    • Le premier est donné par l’augmentation des gains initiaux et finaux de l’agent ou, selon les accords, par l’augmentation du chiffre d’affaires initial et final réalisé par le commettant dans la zone d’activité de l’agent ;
    • Le second est un pourcentage qui augmente en fonction de l’augmentation des ventes.

Il est évident que les indemnités prévues par les AEC sont définies d’une manière différente par rapport aux critères établis par la Directive et mis en œuvre par l’article 1751 du Code civil.

Suite à la mise en œuvre de la Directive européenne et à la naissance, à côté de la disposition des conventions collectives économiques, de la nouvelle indemnité de rupture prévue par l’article 1751 du Code civil, la jurisprudence et la doctrine ont longtemps débattu pour savoir laquelle des deux disciplines devait prévaloir.

Selon une opinion minoritaire en matière de jurisprudence de légitimité, il fallait comparer a posteriori le système codifié et le système contractuel-collectif, en appliquant les règles qui, dans le cas concret, garantissaient à l’agent un meilleur traitement économique.

L’opinion dominante, en revanche, était que la comparaison devait être faite au préalable et que les règles des conventions collectives devaient toujours être appliquées parce qu’elles étaient plus favorables.

Les accords prévoyaient en effet le droit à une indemnité de fin de contrat dans tous les cas et pas seulement dans le cas des conditions énoncées dans la Directive européenne.

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4. L’INTERVENTION DE LA COUR DE JUSTICE EUROPÉENNE

Face aux différentes positions prises par la doctrine et la jurisprudence sur les rapports entre l’article 1751 du Code civil – tel que modifié suite à la transposition de la Directive européenne – et les accords économiques collectifs, la Cour de cassation a posé à la Cour de justice des Communautés européennes une question préjudicielle sur l’interprétation des articles 17 et 19 de la Directive 653 du 18 décembre 1986.

La Cour de cassation a estimé nécessaire d’obtenir des éclaircissements afin de comprendre si la législation nationale transposant la Directive pouvait permettre à une convention collective de prévoir une indemnité versée, en partie, dans tous les cas de résiliation du contrat et quantifiée sur la base de certains pourcentages de la rémunération perçue par l’agent au cours de la relation.

Dans son arrêt C-465/04 du 23 mars 2006, la Cour de justice de l’UE a interprété les articles 17 et 19 de la Directive dans le sens que : l’indemnité de cessation de contrat qui résulte de l’application de l’article 17, paragraphe 2, de la directive ne peut pas être remplacée, en application d’une convention collective, par une indemnité déterminée en fonction de critères autres que ceux fixés par cette dernière disposition sauf s’il est établi que l’application d’une telle convention garantit, dans tous les cas, à l’agent commercial une indemnité égale ou supérieure à celle qui résulterait de l’application de ladite disposition. » et a précisé que le caractère défavorable ou non de la dérogation aux dispositions de l’article 17, permise par l’article 19 avant l’expiration du contrat, « doit être appréciée au moment où les parties l’envisagent. Ces dernières ne peuvent convenir d’une dérogation dont elles ignorent si elle s’avérera, en fin de contrat, être soit en faveur, soit au détriment de l’agent commercial ».

La Cour a précisé que l’exception serait admissible si l’application d’une convention collective n’était jamais défavorable à l’agent commercial.

L’arrêt de la CJCE du 23/03/2006 n° C-465/04 a en effet établi que les conventions collectives ne pouvaient déroger au régime de l’article 1751 du Code civil que si elles étaient en mesure de garantir en tout état de cause à l’agent « une indemnité supérieure ou au moins égale à celle qui résulterait de l’application de l’article 17 de la directive ».

Selon une partie de la doctrine, l’arrêt de la Cour de justice de l’UE du 23/03/2006 a sanctionné la nullité des règles prévues par les conventions collectives économiques parce qu’elles ne garantissent pas toujours et en tout cas le paiement aux agents d’une indemnité supérieure à celle résultant de l’application de l’article 1751 du Code civil.

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5. LE SCÉNARIO ACTUEL

Après l’arrêt C-465/04 de la Cour de justice de l’UE, on a beaucoup anticipé la position que prendrait la Cour de cassation sur la validité ou non des indemnités de départ prévues par les accords collectifs économiques.

La Cour de cassation a affirmé la pleine légitimité de la négociation collective, précisant même que les indemnités prévues par celle-ci représentaient un traitement minimum garanti pour l’agent.

En premier lieu, la Section du travail, par jugement n° 21301 du 3 octobre 2006, prenant position sur la question de savoir si les règles du Code civil ou celles des conventions collectives économiques devaient prévaloir, a établi la prévalence de la discipline qui, au moment de la cessation de la relation, était plus favorable dans les faits pour l’agent.

Des arrêts ultérieurs de la Cour de cassation sont allés dans le même sens, comme la Cassation Civile, Section du Travail n° 12724 du 01/06/2009, qui a établi que la quantification de l’indemnité calculée sur la base des critères établis dans les conventions collectives économiques peut être complétée par le juge jusqu’au maximum prévu par l’article 1751 du Code Civil, qui a confirmé que ce qui est prévu par la négociation collective représente un « traitement minimum garanti » au-delà duquel il est possible d’aller dans le cas des conditions prévues par l’article 1751 du Code civil.

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6. QUAND L’INDEMNITÉ DE RÉSILIATION N’EST-ELLE PAS DUE ?

Outre dans les cas où les conditions visées à l’alinéa 1 de l’art. 1751 du code civil ne sont pas remplies, l’indemnité n’est pas due :

  • Lorsque la résiliation du contrat a été exercée par le commettant en raison de l’inexécution de l’agent qui, selon la discipline nationale, légitime la cessation immédiate de la relation. C’est ce qu’on appelle le retrait pour juste motif.
  • Lorsque c’est l’agent qui résilie le contrat. Il s’agit donc d’une démission volontaire ;
  • Lorsque, en vertu d’un accord avec le mandant, l’agent transfère le contrat d’agence à un tiers.

Il convient également de souligner immédiatement que, même en cas de démission de l’agent, les indemnités seront dues si la résiliation est justifiée :

  • Par des circonstances imputables au mandant ;
  • Par des conditions particulières de l’agent telles que l’âge, l’infirmité ou la maladie, pour lesquelles la poursuite de la relation ne semble pas raisonnablement réalisable.

L’indemnité sera toujours due en cas de décès de l’agent.

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7. L’INDEMNISATION DES DOMMAGES

L’article 1751, alinéa 4, prévoit que le paiement de l’indemnité ne fait pas obstacle à d’autres demandes d’indemnisation.

La règle ne doit pas prêter à confusion : la nature des indemnités en question n’est pas indemnitaire mais compensatoire au sens large.

Il est donc évident que le paiement d’indemnités ne peut pas exclure les demandes qui ont une nature et une source dans des faits ou des actes différents.

La Cour de cassation qui s’est prononcée sur la question (Cour de cassation, Section II, 05/12/2013, n° 27294) a précisé à cet égard que « la disposition de l’art. 1751, alinéa 4, Code civil se réfère à des dommages supplémentaires par rapport à ceux causés par un délit contractuel ou extracontractuel, puisque ladite disposition configure une hypothèse d’indemnisation distincte de celle causée par un fait licite (la cessation du rapport) envisagée par l’alinéa 1 du même article 1751 du Code civil, avec laquelle elle peut donc être cumulée, à condition que les exigences subjectives et objectives dudit fait illicite existent dans le comportement du commettant ».

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